Y perdrais-tu tes droits si l’on fouillait ton pantalon ?

Battues parce qu’indomptables, violées parce que peu couvertes, brûlées vives parce que sorcières, mais chéries lorsque dociles et aimantes. Tel est le sort de la moitié de la population. Des femmes blanches, noires et métisses ; petites, grandes et alambiquées ; trans, hermaphrodites et autres minorités. Toutes, depuis des générations, subissent l’oppression de leurs homologues masculins. Envers et contre tout, envers et contre le temps.

Mais qu’en est-il de nos droits ? De nos libertés ? Aura-t-on un jour l’assurance de pouvoir s’y référer ?

Je vous concède que l’on pourrait y trouver des exceptions : les femmes trans auraient-elles leur place, au même titre que les femmes, dans des lieux publics dits “féminins” ? Il en va de la sécurité de tous et sur ce point je vous l’accorde, nous y trouvons encore à redire.

Imaginez. Votre petite fille s’entraîne au centre sportif et se change dans les vestiaires communs, nez-à-nez avec une quadragénaire trans. Qu’en pense le club sportif ? Ne serait-ce pas du voyeurisme ? De la pédophilie ? Cet individu s’identifie peut-être comme femme, cela ne signifie pas toujours une transition immédiate voire une transition tout court. Devrait-on se référer aux vestiaires communs “de sexe féminin” ou masculin ? Et qu’en est-il de la vie privée ? De son intimité ? Des solutions sont fort heureusement pensées et mises en pratique peu à peu : toilettes non genrées, vestiaires enfants et adultes séparés.

Samedi, 15h30. Vous avez rendez-vous chez l’esthéticienne. Quelle n’a pas été votre surprise quand elle vous annonce avoir dû annuler un rendez-vous avec une autre cliente. Celle-ci venait de faire sa transition mais avait conservé ses attributs masculins. L’esthéticienne refusait de s’en occuper. Pourrait-on lui en vouloir ? Avait-elle le droit de la refuser ? Serait-on défini par ce qui se trouve dans notre pantalon ?

On y perçoit là la différence entre le sexe, qui se base sur nos attributs, et le genre, sur notre ressenti, nos émotions, notre vécu construit par notre environnement social. On intériorise les stéréotypes de genre dès notre naissance : bleu pour un garçon, rose pour une fille, le foot et la danse, les chevaliers et les princesses.

Toute notre enfance a été consolidée dans le but de nous présenter le chemin de la masculinité ou de la féminité mais personne ne nous a prévenus qu’il s’agirait de codes pouvant être agencés, manipulés, modifiés, décodés et recodifiés de nouveau, comme on l’entendait. Que rien n’était marqué au fer rouge sur notre peau.

Les femmes n’ont pas toujours été considérées comme inférieures. L’Académie française y a eu un rôle important et ne s’en est pas privée. Des femmes étaient présentes au quotidien dans tous les domaines au Moyen Âge et n’étaient pas cloîtrées entre quatre murs dans l’attente de leur prince charmant.

Ces derniers siècles de sédition ont peu à peu passé et l’on reconstruit l’Histoire en y ajoutant l’apport de l’autre moitié de la population, tombée dans l’oubli : le droit de vote, d’ouvrir son propre compte en banque, à l’avortement, de porter un jean (qui n’était légal qu’à partir de 2013 en France)…

Ces luttes prennent du temps, je ne le nie pas, mais triomphent et triompheront. Ainsi, il en sera de même pour toutes les minorités ; les femmes racisées, LGBTQIA+, défavorisées… Tous les combats seront menés jusqu’à leur hégémonie.

Qu’il soit question d’épilation chez l’esthéticienne, de changement de tenue dans les vestiaires, j’espère un jour pouvoir revendiquer mes droits comme les milliards d’autres femmes sur Terre sans devoir prouver ce que j’ai sous mon pantalon. Ce monde acceptera-t-il enfin ses habitants sans crier à l’infamie ou à la damnation dès que l’on sort des sentiers battus ? Nous permettra-t-il enfin de nous accepter chacune comme nous sommes : amantes, sorcières et indomptables ?

Arsinoé Dessy

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