Qui dit rentrée académique (ô joie) dit rentrée culturelle (ou résurrection, vu le contexte), et qui dit culture dit, entre autres, expositions ! C’est ainsi qu’à Louvain-la-Neuve, à Ottignies, à Bruxelles (à Paris même – pourquoi pas ?), nous aurons la chance d’assister à la triennale Magma, jusqu’au 28 novembre.
Des peintures contemporaines, des photographies, des reliques grecques, romaines, arabes, des fossiles, des animaux empaillés (ah tiens ?), films, musiques, projections, machines, inventions, bibelots, statuettes africaines, poteries précolombiennes… Nous l’aurons compris, c’est tout une panoplie à priori hétérogène – tout un magma, si je puis me permettre le petit mot – que se donne pour mission de nous offrir cette exposition, et c’est une chose bienheureuse et pertinente lorsque l’on sait que le thème de Magma est la fluidité. Thème bien d’actualité : fluidité de genre, certes, mais plus fondamentalement fluidité d’identité et construction (je vous renvoie à ce cher Freud) de la personnalité. Mais la fluidité, c’est également dans notre relation à tout, au monde que nous la retrouvons, ce qui n’est bien entendu pas sans rappeler toutes les problématiques soulevées par la crise environnementale. Des identités, donc, et des relations, tout un programme !
Car le voilà le but du projet : à travers la confrontation à des œuvres aussi diverses que singulières, nous sommes chacun, chacune amené.es à reconsidérer, par le rapport que nous entretenons à l’œuvre, notre rapport à nous-mêmes. Qu’a de si touchant, et partant, enrichissant cette statuette d’Afrique que je peux considérer juste à côté d’un retable du Christ ? Comment me positionner, en tant qu’individu, en tant que membre de l’espèce humaine, face à cette peinture d’une silhouette à peine perceptible, face à cet artiste façonnant et écrasant directement des visages en argile, face à ces animaux empaillés qui semblent me regarder moi, humain, seul de l’autre côté de cette vitre ? Il n’est ici pas question de proposer une visite académique, très scolaire, d’une galerie de tableaux comme on a pu avoir le plaisir (immense) de le faire auparavant. Non, nous sommes sans cesse sollicité.es – et il s’agit là bel et bien de l’intention des deux organisateurs, Adrien Grimmeau et Muriel Andrin –, nous sommes sans cesse saisi.es face à cette pure altérité en interaction constante avec nous, et nous ne pouvons nous empêcher de nous poser cette sempiternelle, cette terrible, cette terrifiante et terrifique question, toutefois essentielle : « Mais qui suis-je ? Mais que suis-je, nom de Dieu ?! »
Magma, c’est une exposition qui fait le pari de nous saisir et de nous déposséder d’une image figée, sclérosée de notre rapport au monde, à l’Autre, à soi et nous invite à reconsidérer, dans toute sa richesse, l’éclatement de tous ces points de vue. C’est une multiplicité de singularités, à portée de main, tout simplement au Musée L de Louvain-la-Neuve, avec ses six étages et son exposition temporaire supplémentaire, ainsi qu’au parking juste en dessous, ou encore au centre culturel d’Ottignies. Magma c’est (argument principal évidemment, ; l’art oui, mais pas à tout prix, voyons…) gratuit si vous êtes étudiant.es. Alors, de grâce, foncez si vous avez une heure ou deux à gagner, car il s’agit véritablement d’une expérience artistique, et humaine, magnifique.