D’abomination crainte à personnage séduisant, le vampire semble avoir traversé une véritable mutation de son identité culturelle. Quelles sont ses origines ? Comment sommes-nous arrivés à la représentation moderne du vampire ?
Les entités vampiriques sont des créatures se nourrissant de l’essence vitale (généralement du sang) et ont existé dans diverses cultures dans le monde. Ce n’est qu’au début du XVIIIe siècle, en Europe de l’Est et du Sud-Est, que des « épidémies » de vampires ont vu le jour. Considérés comme des revenants, on leur attribuait classiquement des décès de maladies incongrues, habituellement au sein de la même famille ou communauté. Cette croyance prend tout son sens lorsque la survenue d’épidémies de tuberculose ont été associés à des épidémies supposées de vampirisme.
Le vampire dans le folklore
Leur première description était un cadavre gonflé, violet, doté de longs ongles et dents avec la bouche remplie de sang, ces caractéristiques ayant été souvent attribuées à une récente consommation de sang. Des récits relatent également des bruits émanant du cercueil qui étaient expliqués par la mastication de sang fraîchement bu. Sans surprise, c’est exactement ce à quoi peut ressembler un cadavre dans les premières étapes de la décomposition dans un cercueil. Le processus physiologique de décomposition permet également d’expliquer des bruits cadavériques après la mort.
Le moyen le plus répandu de destruction était d’exhumer le corps et d’enfoncer un pieu d’arbre dans leur cœur. C’était un moyen de « dégonfler » le cadavre et ainsi de faciliter le départ de l’âme rémanente dans le corps d’apparence préservé.
Le vampire étant jugé être une créature satanique, des objets sacrés, comme le crucifix et l’eau sacrée, étaient utilisés comme des talismans de protection. Leur qualité de revenant ont parfois fait d’eux des êtres sans âme, amenant naturellement l’idée selon laquelle ils n’auraient pas de réflexion dans le miroir. La chaleur étant classiquement associée au vivant, les vampires en sont dénués, manifestant leur nature duelle, à cheval entre la mort et le vivant. Ce motif est également retrouvé dans la blancheur de leur peau, qui symbolise la maladie (l’anémie).
La chauve-souris, nocturne et laide, était considérée comme démoniaque. La découverte de sa cousine « vampire » va léguer au vampire folklorique les canines caractéristiques, la cape noire et la transformation emblématique. Elle va ancrer le vampire comme une créature de la nuit craignant la lumière du soleil et se reposant dans son cercueil le jour.
Le vampire dans la littérature
L’œuvre la plus quintessentielle contribuant à l’image contemporaine que l’on se fait du vampire est « Dracula » (1897) de Bram Stoker. Sa première description physique est la suivante : un grand vieillard vêtu de noir de la tête au pied, des mains creusés et glaciales, un nez d’aigle, un front haut et bombé avec les cheveux rares au niveau des tempes mais abondantes sur le reste de la tête, des sourcils broussailleux, une expression cruelle avec des dents pointus éclatantes de blancheur et des oreilles pointus. Par la suite, il est également décrit comme riche, charismatique avec une grande appétence sexuelle.
Au milieu du XXe siècle, des femmes commencèrent à écrire à propos des vampires, notamment en inversant les schémas classiques. Le vampire se rapprocha progressivement d’un héros tragique, où résister à la pulsion irrépressible du sang était leur plus grande preuve d’amour, plutôt que d’un être malicieux.
C’est ainsi que, de fil en aiguille, à partir d’un revenant monstrueux d’allure cauchemardesque, nous sommes arrivés au charismatique Edward Cullen dans Twilight, peint comme un vampire séduisant, torturé et amoureux de la protagoniste.