Faire passer un recul dans les droits des personnes non binaires pour une avancée

Après des années d’impasse politique, le nouveau ministre de l’Intérieur Bernard Quintin (MR) annonce : il sera bientôt possible de supprimer la mention du genre sur sa carte d’identité. Ce projet, une avancée dans les droits des personnes non-binaires en apparence uniquement, est loin de faire l’unanimité auprès des militants LGBTQIA+. 

La proposition de Bernard Quintin est la suivante : permettre la suppression de la mention du genre sur la carte d’identité pour les personnes qui en font la demande « expresse et formelle ». Il existerait donc deux types de cartes d’identité ; l’une reprenant la mention du genre F/M (attribuée par défaut) et l’autre ne reprenant aucune mention de genre (attribuée sur demande). Cette solution déçoit fortement certaines organisations activistes pour qui cette idée du nouveau ministre de l’Intérieur « ne change rien » à la situation des personnes non-binaires et ne permet que de « rendre son propre genre invisible ».

Six années depuis l’arrêt de la Cour constitutionnelle

Le débat au niveau politique a été initialement instigué par un arrêt de la Cour constitutionnelle de 2019 jugeant discriminatoire le maintien des catégories de genre binaires sur la carte d’identité. En conséquence, il était du ressort du législateur de remédier à cette lacune et d’aménager une option pour les personnes non-binaires. Aucune limite de temps n’a été prescrite par la Cour constitutionnelle, néanmoins, il ne semble pas déraisonnable de considérer qu’après six ans, il était bien temps. 

Retour en arrière…

La première solution imaginée à la suite de l’arrêt de 2019, adoptée par l’Allemagne, les Pays-Bas et le Canada, était l’ajout d’une troisième mention du genre : le « X ». Cette option a l’avantage indéniable de permettre aux personnes non-binaires de réellement choisir de s’identifier comme tel à l’état civil. Elle a néanmoins été abandonnée assez rapidement par le gouvernement précédent au profit de la suppression pure et simple de la mention du genre sur toutes les cartes d’identité. Cette mesure, moins satisfaisante que la première, reste cependant une solution permettant de se mettre en conformité avec l’arrêt de la Cour constitutionnelle.

Entretemps, des élections ont eu lieu, un nouveau gouvernement a été formé et aucun changement dans la loi n’est encore intervenu. Bernard Quintin, accédant au poste de ministre de l’Intérieur, annonce alors une troisième voie : la suppression de la mention du genre sur la carte d’identité uniquement sur demande expresse. Les associations LGBTQIA+ déplorent cette alternative qui opère, selon elles, un réel recul et pose le risque de marginaliser les personnes non-binaires. Elle ne remédie aucunement à la discrimination identifiée par la Cour constitutionnelle, bien au contraire.

…ailleurs aussi

Il n’y a pas qu’en Belgique qu’on observe un recul. Dès le premier jour de son nouveau mandat, le 25 janvier passé, Trump fait brutalement marche arrière aux Etats-Unis : par décret, il met fin à la délivrance de passeports avec la mention « X », ne reconnaissant plus que « deux sexes ». Le message est clair : ceci ne marque que le début du détricotage, par son administration, de tous les acquis de la communauté LGBTQIA+ aux Etats-Unis. 

Face à ces tendances conservatrices qui s’observent également ailleurs, notamment en Italie, on regrette que le nouveau gouvernement belge ne prenne pas de position plus ferme en faveur de l’inclusivité, au lieu de vouloir créer des régimes en marge, qui ne permettent pas réellement aux personnes non-binaires de s’émanciper. 

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